COMMENT DÉVELOPPER L'ATHLÉTISME ?
C'est, à priori, étendre notre base de recrutement et accroître
le niveau de performance des meilleurs. Jusqu'à ce jour, ces deux options
ont toujours été mises en avant, comme objectifs affirmés
ou sous-jacents aux différentes actions entreprises.
A) Étendre notre base de recrutement vers les plus
âgés et vers les plus jeunes.
1) Vers les plus âgés, cela a consisté
à accueillir dans nos rangs - à grand renfort de "passrunning"
ou "runningpass", enfin un machin comme ça - les personnes
qui, vers la quarantaine, prennent soudain conscience que les années
passent et que eux aussi sont mortels, et que, peut être, la pratique
d'une certaine activité physique est un bon moyen de retarder l'échéance
fatale. Fort bien, on en est tous là, mais si demain je transforme ma
licence de dirigeant en licence de pratiquant, ou que je convaincs mon voisin
de prendre une licence pour faire du jogging, l'athlétisme Français
se portera-t-il mieux ? J'en doute fort.
Reste donc la jeunesse.
2) Vers les plus jeunes, des licences athlé-loisir
on été instituées pour toucher les tranches d’âges
les plus jeunes. Très bien, il fallait le faire et il faut le maintenir,
ne serait-ce que pour compenser la
carence du sport scolaire, en donnant à ces jeunes un certain niveau
de pratique physique, des habitudes de travail et en leur enseignant le respect
de la règle, fondement primordial de la vie sociale.
Mais est-ce bien l’objectif premier d'une Fédération Sportive dont le but ultime est le plus haut niveau de la compétition internationale ? Ces objectifs pédagogiques, certes louables, ne sont-t-ils pas précisément ceux de l'Éducation Nationale et du Sport scolaire ?
Le but de notre Fédération ne serait-il pas plutôt de découvrir les jeunes talents qui feront briller notre Athlétisme lors des grandes rencontres internationales ? Or si l’on regarde les chiffres, combien retrouve-t-on de ces jeunes issus des écoles d'athlétisme dans les catégories où on espérait les voir aboutir pour s’élever vers le meilleur niveau ?
Très peu et ce pour trois raisons au moins :
- La première est que les jeunes - dès l'instant
où ils ne sont pas dans un "bain culturel athlétique",
soit parce qu'on parle abondamment et positivement de notre sport dans les médias,
ce qui serait motivant car ils auraient alors le sentiment d’appartenir
à une « grande famille » à « un clan »
qui « fonctionne bien et dont on parle» - mais en parle-t-on ? soit
parce que les parents sont des fans d'athlétisme – mais combien
sont-ils ? "zappent" d'un sport à l'autre tant qu'ils n'ont
pas atteint une certaine maturité, c’est-à-dire vers les
catégories cadets ou juniors.
- La seconde est, que tout un chacun n'a pas nécessairement
les aptitudes physiques et mentales pour à atteindre un haut niveau de
performance en compétition et que, se retrouver de compétitions
en compétitions et de mois en mois le "dernier de la classe",
ce n'est pas très gratifiant.
- La troisième est que notre système d'animation
des jeunes catégories est de fait une sorte de "vaccin" contre
la pratique de l'athlétisme.
Qu'est-il proposé aux jeunes catégories ? Des compétitions
au cours desquelles 200 à 300 gamins "traînent" sur le
stade d'une course (pour laquelle ils "poirotent" 20 à 30 mn
avant de pouvoir s'activer), à un lancer (où il faut faire la
queue entre 1/2 heure à 3/4 d'heure), à un sautoir (où
le temps d'attente est au minimum le même). Il découle qu'après
deux à trois heures d'errance incertaine sur le stade, ils n'ont, au
plan énergétique, rien dépensé, au plan moteur,
rien appris et que pour couronné le tout ils se sont ennuyés comme
des "rats morts », sans même avoir eu la satisfaction de savoir
s’ils sont parmi les bons ou les moins bons, puisqu'aucun classement ne
peut être fourni avant 10-15 jours.
Dans le même temps les athlètes des catégories pour lesquelles
le développement de la pratique jeune a été initiée
– les cadets, juniors, espoirs et seniors - se morfondent eux aussi et
se sentent plus ou moins laissés pour compte en attendant que la place
se libère.
Quant aux officiels, des bénévoles, toujours les mêmes,
mis à contribution chaque fin de semaine, des heures et des mois durant,
ils finissent eux aussi par en avoir "ras la casquette", et que dire
des administratifs, quand ce ne sont pas les mêmes que les entraîneurs
ou les officiels, qui se débattent pendant des jours pour faire rentrer
les données dans un logiciel conçu par des gens qui semblent n'avoir
qu'une idée très abstraite de ce qu'est l'athlétisme de
base.
Propositions :
Il est certes utile de faire pratiquer dès le plus jeune âge une
forme ludique de l'athlétisme - en espérant conserver les éléments
les plus talentueux pour la pratique de haut niveau, but ultime de notre sport.
C'est ce qui a été fait depuis des décennies, avec les
résultats décevants que l'on sait. Pour ces petites catégories,
il me paraîtrait plus judicieux de limiter la pratique de la compétition
au seul niveau du club et non pas en l'instituationalisant au niveau des Comités
ou Ligues Régionales, comme c'est le cas actuellement.
Cependant, une rencontre départementale unique, les "olympiades des jeunes" par exemple, pourrait être organisée une fois l'an, sur toute une journée, avec pic-nick collectif regroupant parents, enfants, dirigeants et officiels, en limitant le nombre des épreuves à quatre - un 50m, un saut en longueur, un lancer de balle ou de vortex et un mille mètre pour finir, avec en fin d'après midi LA FINALE départementale regroupant les 8 à 16 meilleurs par épreuve - la finale A et la Finale B, et un classement publié en fin de journée. Voilà qui serait ludique, convivial et motivant pour chacun. Au cours des séries, les parents pourraient même, éventuellement, être incorporés aux épreuves, par exemple à raison d'un "vieux" pour 7 jeunes ?
Ce type de compétition "pratiquable" sur une journée, permettrait aux jeunes, et à leurs parents, de faire de l'athlétisme à leur niveau, de s'amuser ensemble et, par le biais des finales à 2 fois 8 et du classement final, de connaître qui sont les meilleurs et de déterminer une hiérarchie. Les 4-5 premiers par épreuve pourraient être invités à assister, ou à participer, aux épreuves régionales ?
Mais dans tous les cas, il faut cesser de gaspiller du temps, de l'énergie, de la passion, de l'enthousiasme pour des organisations qui ne débouchent sur rien de concret, si ce n'est la lassitude ou l’écoeurement des participants.
B) Améliorer le niveau de performance des meilleurs.
Là je vais enfoncer des portes ouvertes.
Pour améliorer ses performances un athlète doit s'entraîner et, pour ce faire, il lui faut non seulement du temps pour l'entraînement proprement dit, mais aussi pour récupérer, en se reposant et en s'alimentant convenablement.
Cela suppose que l'athlète de haut niveau dispose de temps.
Il doit donc être, soit rentier, soit disposer d'un travail adéquat,
ou encore être chômeur.
Jusqu'à ce jour chez la plupart des athlètes de haut niveau français,
et plus particulièrement chez les lanceurs - je dis athlètes et
non pas sportifs, comme la confusion est constamment entretenue dans les discours
et les médias – qui ont brillé au plan international, très
peu disposaient d'un travail adapté, bien moins encore étaient
rentiers, mais beaucoup plus, par contre, étaient sans emploi.
Quelle situation enviable et stimulante pour atteindre le plus haut niveau,
l'esprit serein !
Chez nos amis allemands, au contraire, un système d'aide au travail adapté
est proposé. Chacun est libre d'y adhérer ou non, s'il en a le
niveau. Ceux qui acceptent d'entrer dans le système sont assurés
d'un emploi stable pour la durée de leur carrière de haut niveau.
L'un est employé à mi-temps (en étant payé à
plein temps ), qui par la poste, qui par une banque, l'autre encore comme policier
ou militaire de circonstance.
Bien entendu il y a une contrepartie, les athlètes qui rentrent dans le système du suivi national, assurés qu'ils sont de la sécurité de l'emploi, sont tenus de suivre un programme d'entraînement concocté par leurs entraîneurs personnels en collaboration avec les responsables fédéraux. Chaque mois, sur trois jours, leur niveau athlétique est contrôlé à partir de tests simples. Chacun à droit à un "joker" - l'erreur est humaine - mais après une seconde erreur, ils sont sortis du système.
Chez nous, à moins que les choses aient changé depuis peu, ceux, peu nombreux, des athlètes de haut niveau qui bénéficient d'avantages sociaux et/ou financiers, ne sont tenus à rien en contrepartie de ces avantages, ils s'entraînent quand ils veulent, comme ils veulent, où ils veulent, sans rendre compte à aucun moment de la façon dont ils procèdent.
Sans aller encore regarder ce qui se passe à l’étranger,
voyons simplement ce qu'il en est au judo, par exemple. L’administration
de la Fédération de Judo est essentiellement assurée par
d’anciens judokas de très haut niveau, qui se soucient plus des
progrès de leurs sportifs de haut niveau, et par conséquent de
leurs conditions d’entraînement, que d’aider nos amis du tiers
monde à se développer. Étonnant non ? Pourquoi ? Mais tout
simplement parce que c’est dans leurs statuts et que c’est la fonction
d’une Fédération Sportive Nationale de compétition.
À chacun son rôle.
Alors quand notre fédération tente d'immiter les actions de l'UNESCO dans les pays lointains, les lanceurs, chez nous, n'ont qu'à se débrouiller par eux-même, comme d'habitude.